Images d'utilité publique - Centre Pompidou

Extrait du catalogue Images d'utilité publique, Editions Centre Georges Pompidou 1998

« Qu’est-ce que le graphisme ?
Force est de constater que le terme « graphisme », utilisé par les professionnels, ne désigne ni dans l’usage courant, ni dans le dictionnaire, une discipline globale. Sans doute la multitude de supports que le graphisme investit, son « émiettement », expliquent-ils en grande partie cette situation. Il faut probablement y ajouter la moindre considération que connaissent en général les objets usuels. Tout se passe comme s’il y avait une réticence à nommer et partant, à reconnaître un art visuel qui fait partie de notre vie quotidienne.
Comment pourrait se développer une réflexion sans que son objet d’étude ne soit quelque peu défini ? L’exposition propose de considérer le graphisme comme un vaste territoire entre la typographie «pure», d’une part, et l’image « pure », d’autre part. Elle s’attache ainsi à regrouper les travaux des graphistes en grands ensembles correspondant aux principales fonctions du graphisme et aux différentes lectures que nous en avons :

Attirer le regard. L’affiche, la couverture de livre, la pochette de disque, ont une fonction d’appel. Du point de vue du récepteur, la lecture d’une affiche, par exemple, est une lecture forcée, un regard happé.

Mettre en pages. Le travail de mise en pages concerne aussi bien le livre, le journal, le dépliant, le catalogue publicitaire, la carte de vœux, etc. Du point de vue du récepteur, cette lecture est une lecture volontaire, notre lecture ordinaire.

Identifier. Le rôle de l’identité visuelle est de faire reconnaître rapidement. Née dans les entreprises, la notion a largement gagné tous les organismes ainsi que les manifestations culturelles éphémères. Logotypes, papiers à en-tête, déclinaisons diverses, habillages télévisuels, appellent une lecture par imprégnation, subconsciente.

Signaler. À l’extérieur, (ville, forêt,…), comme à l’intérieur (bâtiment public), la signalétique oriente et informe dans l’espace. Elle obéit à une autre échelle que celle de la page, même si elle est lue de manière volontaire, puisque le regard cherche l’information.

Pour l’écran. On retrouve ces grandes fonctions du graphisme dans les travaux pour l’écran. Les habillages de chaînes de télévision, par exemple, déclinent une identité visuelle tandis que les mises en pages de cédéroms ou de sites Internet sont réalisés pour un environnement interactif.

En réponse à une commande publique ou privée, le graphiste donne aux idées une forme visuelle reproduite généralement sur un rapport papier, mais qui peut l’être également sur un écran ou une architecture, forme qui sera reçue, vue, maniée par des centaines, voire des centaines de milliers de personnes. Son travail consiste à analyser les besoins en communication de son commanditaire et à leur donner une solution visuelle appropriée.
Pour élaborer sa proposition, il détermine tous les éléments qui composent l’image : la typographie, la calligraphie, la mise en page, la qualité du papier, les couleurs, l’emploi éventuel de photographies et d’illustrations. Il suit la production du projet de sa conception jusqu’à l’impression et à la fabrication. Il élabore des images graphiques pour des affiches, des publications, du matériel d’information, des timbres, des billets de banque, conçoit l’identité visuelle d’institutions (logotypes et symboles et leurs déclinaisons sur le matériel imprimé et l’architecture), réalise des programmes de signalétique, des plans et des cartes. Il met en page des formulaires. Il travaille comme indépendant en petite équipe ou en bureau plus important, dans le département de graphisme d’un bureau de design industriel, d’architecture, dans un bureau intégré à une firme, à une administration, ou dans une agence de publicité. Selon le cadre dans lequel il travaille, son autonomie est plus ou moins grande. Plus les objectifs de la communication sont déterminées par les stratégies commerciales, plus son savoir-faire sera orienté par ces stratégies.
Artiste et technicien, son rôle varie selon la nature du problème posé. Il peut jouir d’une grande liberté d’expression plastique quand il conçoit une affiche pour une manifestation culturelle ou mettre en œuvre sa capacité d’analyse et d’organisation quand il réalise un système signalétique fait pour durer. Il doit savoir manier, dans les deux cas, avec sensibilité et subtilité, des codes visuels familiers pour inventer de nouvelles solutions graphiques.
Médiateur entre le commanditaire qui émet le message et le public qui le reçoit, il contribue à la valorisation ou à la dévalorisation d’un contenu. Il doit être conscient de la finalité de ses productions, car elles participent à la construction du paysage esthétique et social quotidien. »